AccueilActualitéGrand témoinSophie Déchelette-Roy : « Le CJD est un peu l'école du dirigeant »

Sophie Déchelette-Roy : « Le CJD est un peu l'école du dirigeant »

Sophie Déchelette-Roy : « Le CJD est un peu l'école du dirigeant »
©C.Vautey

ActualitéGrand témoin Publié le ,

Qu'est-ce qui vous a amenée à rejoindre le CJD il y a maintenant huit ans ?

Je suis entrée au CJD parce que j'avais besoin d'échanger avec d'autres dirigeants, pour voir comment ils abordaient les différentes problématiques de l'entrepreneuriat dans leurs entreprises respectives. J'avais créé mon cabinet en 2004 et je me suis rendu compte au fil des années que je me sentais seule pour faire face à certains sujets du quotidien. Je n'avais pas reçu de formation spécifique pour être chef d'entreprise et j'avais réellement besoin d'apprendre. Et le CJD c'est justement ça : un lieu dans lequel on vient pour apprendre certaines facettes de son métier de chef d'entreprise. En fait, on rentre au CJD quand on a envie d'apprendre, mais aussi de se remettre en question, de remettre à plat ses croyances, de bouger ses propres lignes.

C'est donc plus une école de l'entrepreneuriat en quelque sorte qu'un espace de réseautage ou un mouvement de défense des intérêts patronaux ?

Tout à fait. Le CJD a été créé en 1938 pour aider les chefs d'entreprise à apprendre leur métier de dirigeant, en ayant toujours en tête un principe essentiel : placer l'humain au cœur de l'entreprise. Le CJD c'est l'économie au service de l'homme. L'objectif de notre mouvement est d'amener les dirigeants à expérimenter en ayant toujours à l'esprit cette philosophie d'humain et de performance globale. Et je vous confirme, en effet, qu'on ne vient pas au CJD pour élargir ou entretenir son réseau, mais pour trouver des réponses aux multiples problématiques que nous rencontrons tous dans notre quotidien de dirigeant, qu'elles soient stratégiques, commerciales, RH, de développement…

Quel que soit le secteur d'activité dans lequel on intervient au quotidien ?

Oui, que l'on soit avocat, comme moi, expert-comptable, hôtelier, industriel… nous devons tous faire face aux mêmes interrogations lorsque l'on sort de notre cœur de métier. Cette transversalité constitue d'ailleurs une des raisons d'être du CJD, car nous apprenons tous de la pratique des autres. Nous avons naturellement tendance à penser que notre métier est tellement particulier que les autres ne pourront pas le comprendre, alors que c'est exactement l'inverse. Le CJD offre un retour miroir qui est frappant de justesse et qui permet à chacun d'avancer beaucoup plus vite qu'en restant seul dans notre coin.

Vous le constatez à titre personnel ?

Oui. Avec le recul, j'estime que le CJD m'a vraiment apporté des idées nouvelles que j'ai mises en application dans mon entreprise. J'ai également pu me persuader que si, effectivement je ne savais pas grand-chose, par exemple sur les RH, je pouvais apprendre en me documentant. Enfin le CJD m'a appris à m'ouvrir et à être à l'écoute. Il m'apporte incontestablement une vision plus large sur mon métier de chef d'entreprise et le dirigeant que je suis a été singulièrement changé dans sa façon de manager.

Est-ce pour cela que vous avez accepté de prendre la présidence du CJD l'année dernière ?

Au fil des rencontres que j'ai faites dans le cadre du CJD depuis mon adhésion, je me suis rendu compte qu'il m'avait énormément apporté. Il m'a donc semblé naturel de rendre un peu ce que j'avais reçu quand on m'a sollicité pour prendre la présidence. Par ailleurs, je suis convaincue que, quand on entre au CJD, on y trouve en fait un peu ce que l'on veut. Et quand on s'implique beaucoup, on se rend compte que le CJD et les autres membres sont une source d'enrichissement personnel. C'est en tout cas le constat que je fais à titre personnel.

Pourriez-vous faire un second mandat dans la foulée ?

Non, les mandats ne sont pas renouvelables, ce qui me semble une très bonne chose, car la présidence du mouvement est chronophage, mais surtout cela permet tous les deux ans d'avoir un nouveau thème de mandat, en ayant toujours en tête les valeurs du CJD. J'ai pris mes fonctions le 1er juillet 2017 et elles prendront fin le 30 juin 2019. Mes vice-présidents sont Sonia Vignon-Jamal et Richard de Lambert. Le processus de désignation du président du CJD repose sur un système de cooptation organisé très précisément. Dès le mois de décembre 2018, nous enverrons à l'ensemble des membres du CJD la liste des adhérents, en leur demandant de sélectionner les noms des trois membres qu'ils verraient bien prendre la présidence. Les trois noms qui ressortent avec plus de 25 % sont « cooptables » et nous ne procédons à une élection que si au moins deux d'entre eux souhaitent prendre la présidence. Mais il n'y a pas de candidat déclaré à l'avance.

Avez-vous le sentiment que ce mandat de président du CJD vous a permis de prendre une autre dimension ?

Oui c'est incontestable. J'ai toujours été associée et je n'ai finalement jamais occupé le devant de la scène. Avec ce mandat, j'ai été obligée de sortir de ma zone de confort. Mais c'est arrivé à un moment où je sentais que j'avais la maturité pour relever ce challenge. Cinq ans plus tôt, je n'aurais pas pu le faire. Mais à aucun moment je ne regrette d'avoir accepté cette présidence, car c'est vraiment exaltant.

Vous évoquez notamment la démarche de formation qui caractérise un parcours au sein du CJD. Concrètement, comment cela se traduit -il au quotidien ?

Nous travaillons notamment au travers de commissions, qui tournent autour de la digitalisation, de la croissance, des nouveaux modèles économiques, du sport, du développement personnel, de la communication non violente… Nous avons également des formations ; le CJD propose même un parcours diplômant qui a été baptisé Parcours Copernic. Il réunit une dizaine de personnes, qui se retrouvent régulièrement pendant deux ans pour travailler sur différents modules tels que la complexité, l'hétérogénéité, la médiation… Je précise qu'il n'est pas impératif de suivre ce parcours. Enfin, nous organisons chaque mois une plénière, qui nous permet de décliner un thème à partir de plusieurs points d'entrée. Il est clair qu'on ne se retrouve pas tous à chaque plénière, mais nous sommes environ une centaine à chaque fois.

Soit quasiment les deux tiers des adhérents. C'est une mobilisation importante ?

C'est en effet une des grandes forces du CJD ; il y a une réelle implication de ses adhérents dans la vie du mouvement. D'ailleurs, c'est une équipe différente qui s'implique dans l'organisation de chaque plénière, afin que tous les adhérents s'impliquent à un moment donné dans l'organisation de nos événements internes. C'est impératif, parce que la préparation d'une plénière représente un investissement personnel important et parce que chacun doit aussi trouver du temps pour s'occuper de son entreprise. D'autre part, cela permet d'avoir des regards différents sur chaque sujet abordé autour du thème central qui a été retenu pour la durée du mandat.

Justement, quel thème avez-vous retenu pour votre mandat ?

Nous avons décidé de placer le mandat sous le signe du talent, ce que nous avons traduit par la thématique suivante : « Révélons nos talents ; osons être acteurs. » Nous allons donc décliner le sujet tout au long de nos plénières, en prenant un ensemble de sujets qui peuvent s'y rapporter. En novembre, nous avions réfléchi ensemble avec une coach et une psychanalyste sur la définition du talent, pour savoir si c'était inné ou acquis. Et nous sommes arrivés à la conclusion que nous avons tous du talent, mais qu'il faut simplement savoir comment le révéler. Pour la plénière de février, le thème retenu était : « Osons ! Ils croyaient que c'était impossible ; alors ils l'ont fait. » En mars nous avons abordé la question de la mixité.

Un sujet qui est au cœur de l'actualité ; comment l'avez-vous abordé ?-

Nous voulions démontrer que l'entreprise gagne toujours à travailler en intégrant cette dimension de mixité, que ce soit dans le cercle dirigeant ou plus simplement au sein des équipes. En revanche, nous ne voulions surtout pas aborder la mixité comme une obligation légale qu'il faut absolument respecter, mais comme une opportunité pour assurer le développement de l'entreprise. Avoir des associés femmes et hommes dans un « board » cela peut apporter quelque chose et c'est l'idée forte que nous voulions faire ressortir. On en revient à ce que j'évoquais il y a un instant, en parlant de la place de l'humain dans l'entreprise.

Justement, privilégier l'humain qu'est-ce que cela signifie pour vous ?

C'est comprendre que l'on n'est rien sans ses salariés et ses équipes. C'est donc être à l'écoute, être bienveillant. C'est aussi comprendre que le développement se place dans le cadre de la performance globale, de la RSE. Et la mixité participe pleinement de cette démarche. Je le dis avec d'autant plus de conviction, que dans le cabinet Archibald nous sommes 8 personnes : 4 femmes et 4 hommes. Ceci étant dit, nous sommes encore trop peu de femmes au CJD, puisque nous sommes environ 25 à 30 % de femmes. Certes c'est un peu mieux qu'au niveau national, mais ce n'est pas suffisant. Nous avons donc axé notre recrutement des nouveaux membres sur cette volonté de revoir ces grands équilibres. Attention, cela ne signifie pas pour autant qu'il suffit d'être une femme pour intégrer le CJD. Il y a tout un parcours d'intégration à suivre et il n'est pas question de remettre cela en cause.

Comment expliquez-vous qu'il y ait moins de femmes parmi vos membres ?

J'ai le sentiment que les femmes osent moins faire la démarche, parce qu'il faut consentir un investissement personnel très fort, en dehors de l'entreprise, et que certaines ne se pensent pas en mesure de l'assumer. Nous avons tout un travail d'explication à mener auprès de ces femmes, pour leur faire comprendre que ce n'est pas du temps perdu et que cette implication aura des effets positifs sur leur vie de chef d'entreprise. Il faut bien comprendre que lorsqu'on est au CJD, on travaille bel et bien pour son entreprise. Que l'on soit homme ou femme, bien entendu. J'ajoute cependant que ce déficit de représentation féminine n'est pas spécifique au CJD. On constate que les femmes s'investissent traditionnellement moins dans les réseaux.

Quel regard jetez-vous sur la conjoncture actuelle et sur les perspectives de développement qui s'offrent aux entreprises lyonnaises ?

La période est réellement enthousiasmante. Les débats sur la digitalisation et le rôle de l'humain, sur l'entreprise du futur, me passionnent. Je crois que les jeunes dirigeants se rendent compte que l'on va pouvoir faire énormément de choses avec cette ouverture sur le digital, comme un outil. J'ai le sentiment qu'il y a un véritable engouement. Je crois que cet avis est partagé par les Jeunes Dirigeants et j'ai le sentiment que le moral d'ensemble est plutôt bon. A contrario, nous avons au sein du CJD des membres dirigeants qui sont en difficulté et nous essayons, par nos échanges et nos commissions de travail, de les entourer afin de passer ce cap difficile et les aider ainsi à rebondir.

Comme vous êtes dans une démarche de partage d'expérience, vous n'envisagez pas d'organiser un événement qui dépasserait le simple cadre du CJD, pour faire passer ce message plus largement ?

Cela s'est déjà produit par le passé. Ainsi en mars 2017, à l'initiative de Laurent Perraud, mon prédécesseur, nous avions organisé un événement au Palais des Sports, où nous avions accueilli 1 500 personnes sur le thème : « Voir le monde autrement. » Nous envisageons de rééditer ce type d'expérience cet automne, à l'occasion du 70ème anniversaire du CJD Lyon. Au mois de novembre, nous allons donc organiser une soirée Prestige, ouverte à un public plus large. Nous placerons naturellement cet événement sur la thématique du talent, puisque c'est le ton que nous avons donné à ce mandat. Ce ne sera peut-être pas un événement aussi ambitieux qu'au printemps 2017, mais nous voulons profiter de cette occasion pour faire connaître nos idées et avancer tous ensemble.

Avancer tous ensemble, cela signifie aussi avec les élus de la Métropole ?

Oui. C'est d'ailleurs un peu ce qui caractérise le modèle lyonnais. Car notre Métropole bouge et il y a beaucoup d'initiatives positives qui sont prises par les différents acteurs économiques locaux. David Kimelfeld, qui était invité de l'une de nos plénières il y a quelques jours, nous a justement présenté tous les projets qui sont en cours ou en réflexion. Il nous a expliqué comment nous pouvions nous intégrer, nous aussi, dans les réflexions qui sont menées. C'est d'autant plus passionnant et enthousiasmant, que Lyon est aujourd'hui une vraie terre d'expérimentation.

Ces échanges avec la Métropole sont-ils fréquents ?

Il nous arrive de participer à des groupes de travail. Ainsi prochainement nous devrions être impliqués dans la démarche French Impact, dans le cadre de laquelle la Métropole ambitionne d'être retenue comme Territoire d'Excellence. Il y a pas mal de membres du CJD qui sont intéressés par ce dossier et qui ont donc « candidaté. » Je peux également citer la Charte des 1000, qui prône la mixité et l'insertion au sein des entreprises lyonnaises. Plus d'une trentaine de nos membres vont signer cette charte et nous avons vocation à en faire signer d'autres, car c'est parfaitement en accord avec les valeurs humaines du CJD.

Dates

1970 : Naissance à Lyon

1995 : Prestation de serment au Barreau de Paris, où elle a terminé ses études de droit après deux années à Lyon.

1999 : Retour à Lyon et inscription au Barreau de sa ville natale

2009 : Adhésion au CJD

2017 : Élue à la présidence du CJD Rhône pour deux ans

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