Tatiana Frolova est, en quelque sorte, le chef d'orchestre de Je n'ai pas encore commencé à vivre. Un spectacle témoignage qui reprend le fil de sa précédente création Génération off dans laquelle elle donnait la parole à de jeunes gens de la ville où elle est installée, pour tenter de comprendre la vague de dépressions touchant les jeunes générations.
D'ailleurs le titre de cette production est une phrase prononcée par une jeune fille de Génération off. Je n'ai pas encore commencé à vivre reprend les procédés habituels de la metteure en scène russe bien connue des Lyonnaises et des Lyonnais, maintenant, puisqu'elle présente toutes ses nouvelles productions dans la capitale des Gaules, se muant, au fil des éditions, en mascotte du festival Sens interdits. Soit des témoignages recueillis au fil du temps, filmés, mêlés de témoignages sur scène, où les comédiens sont saisis en gros plan pour donner à entendre à la fois le récit de leur vie et celui des tyrans qui les ont dirigés. De Lénine à Gorbatchev en passant par Staline, la grande histoire se fait entendre tandis que Tatiana Frolova inscrit les morts à la craie sur un tableau noir.
Car ce qui fait l'immense force de l'oeuvre de cette femme à la détermination sans faille, c'est un humour toujours présent et une sobriété exemplaire qui empêche de sombrer le pathos. Le tragique n'est est que plus sensible, d'autant que les interprètes cultivent la justesse, le calme et l'épure.
Et alors que cette histoire n'est pas notre, elle résonne de façon universelle. Quand le témoignage de l'éditeur Vladimir Yakovlev interpelle, avec cette apostrophe « Et vous, vous vous êtes déjà demandé comment le vécu de trois générations consécutives de vos ancêtres directs influait sur votre conception du monde ? Celle de votre femme ? De vos enfants ? Si non, posez-vous la question. », nul ne peut rester imperméable !
Les Célestins au théâtre du Point du jour, jusqu'au 12 décembre, www.theatredescelestins.com