La Chine : aujourd'hui même Detroit ne la lâche pas des yeux. Là-bas comme à Stuttgart et Billancourt, comme à Tokyo et Wolfsburg, à Séoul, à Munich, à Sochaux, les ingénieurs guettent les décisions du ministère chinois de l'Industrie et des Technologies de l'informatique. Dans les états-majors, les ficeleurs de business plans dissèquent les annonces du ministère chinois des Finances.
La Chine. Pour qui fabrique et vend des automobiles, il n'existe pas plus attractif terrain de jeux. Pas plus branché. Des acheteurs en masse comme nulle part ailleurs (1,35 milliard d'habitants). Un réservoir pour des décennies de clients potentiels, non encore motorisés.
La Chine c'est le nouveau « Nouveau Monde », le marché à ne pas manquer. « The place to be », martèlent les Américains. N'y manquent ni le savoir ni les idées ni les outils.
Ce mois de juin, le premier réacteur EPR au monde a démarré dans le Sud de la Chine, à Taishan. Un deuxième, à proximité, entrera en service courant 2019. En France, l'EPR de Flamanville (Manche) ne fonctionnera pas avant l'année prochaine ; un aboutissement dans la douleur : sept ans de retard dans la livraison, coût multiplié par trois (10,5 Md€).
Face à Google, Apple, Tesla, Uber qui soutiennent l'innovation en Amérique, la Chine dispose de Baidu (intelligence artificielle), Huawei (télécoms), Didi (services de VTC), Tencent (Inernet).
S'agissant d'automobiles, le pays exerce le plus puissant appel d'air sur la planète. Leçon de choses : les dernières immatriculations annuelles de voitures neuves. 86 millions dans le monde, 24,7 millions en Chine, 16,8 millions aux Etats-Unis, 15,6 millions en Europe.
Automobilistes de fraîche date, les Chinois font valoir leurs préférences. Ils apprécient les tableaux de bord qui brillent. Laqués. Il leur faut des places arrière spacieuses et confortables ainsi que du coffre. Moins anecdotique : l'écologie les stimule, l'après-pétrole ne leur fait pas peur.
En 2017, ils ont acheté 576 247 VEA, véhicules particuliers à énergies alternatives (électriques et hybrides rechargeables). Soit 47 % du total mondial. En deuxième position, les Américains n'ont pas acquis plus de 197 535 VEA.
Marché prépondérant, prioritaire, la Chine commence à formater l'automobile. L'Audi Q8 à trois rangées de sièges vient d'y apparaître en première mondiale. Dévoilé à Londres en mai dernier, le tout-terrain de loisirs Rolls-Royce Cullinan fera aussi carrière en Chine. Prix de base : 250 000 livres (285 000 €). Premiers tours de roues du plus cher des SUV au cœur de la première puissance mondiale par le PIB (depuis 2014) : quoi de plus pertinent ?
Plus révélateur, le cas C5 Aircross.Né en Chine, produit en Chine depuis septembre 2017, le véhicule sort aussi de l'usine de Rennes depuis le début de l'été. « Nous l'avons adapté au reste du monde », révèle Jean- Philippe Lamy, chef du projet C5 Aircross à Rennes. Jusqu'ici on faisait l'inverse ». Signe des temps : cette Citroën littéralement made in France intègre 15 % de pièces chinoises. Le site breton les réceptionne à raison de cinq conteneurs par jour.
L'inverse exactement.
L'autonomie des électriques dans le collimateur
Le 13 février, le ministère chinois des Finances a accru les aides à l'achat de modèles alimentés par batteries dont l'autonomie dépasse 400 km : 50 000 yuans au lieu de 44 000 (6 290 € contre 5 540). Les hybrides rechargeables bénéficient de faveur fiscale, elles, à partir de 150 km d'autonomie en mode 100 % électrique. Précédemment 100 km.
En 2019, les constructeurs exerçant en Chine devront justifier de 10 % de voitures électriques dans leur production. Du coup, BMW assemblera l'eMini en Chine en liaison avec CATL, le premier fabricant chinois de batteries. Incontournable, ce fournisseur a signé des accords avec les filiales dans le pays de Honda, Nissan, Volkswagen, Daimler, Hyundai.
Depuis le 1er août, le recyclage des batteries incombe aux constructeurs d'automobiles. Certains ont pris les devants. Ils sous-traiteront l'activité à des groupes spécialisés.