Un an presque, après le coup de tonnerre et la décision par la Région Auvergne-Rhône-Alpes de lui supprimer une subvention annuelle de 350 000 euros (soit environ un tiers de son budget global), la Villa Gillet affiche sa détermination à poursuivre sa vocation de centre, quasi unique, de création et d'expression littéraire, en France mais également à l'échelon international.
C'est à l'occasion de la présentation du festival Littérature Live (9-14 mai), le 14 mars, que cette institution culturelle lyonnaise, dirigée par Lucie Campos depuis 2019, a ouvert un nouveau chapitre de son histoire.
Par la voix de son élue en charge de la Culture, Sophie Rotkopf, la Région avait ainsi argumenté sa décision : "Dans le cadre de son nouveau plan en faveur de la culture et du patrimoine voté en octobre 2022, la Région Auvergne-Rhône-Alpes entend renforcer l’accès à la culture pour les habitants des territoires qui en sont le plus éloignés. Elle a dès lors procéder à un rééquilibrage de ses subventions en faveur des territoires ruraux. Avec des efforts renouvelés en matière d’équité territoriale, la Région a décidé de retirer son soutien à la Villa Gillet. Malgré une programmation de qualité et une équipe investie au service de la littérature internationale, cet établissement n’entrait plus dans les priorités de la politique culturelle de la Région".
La Villa Gillet, créatrice "d'intelligences"
Et l'on devine, aux dires du président de la Villa Gillet, Michel Lussault, l'émotion vive au sein de ses équipes, suscitée par cette décision régionale :
"C'est une tentative d'élimination, un crime de bureau organisé qu'a connu la Villa Gillet. En cette période troublée, cette époque de vertiges, autant sociaux, économiques, politiques qu'environnementaux, nous n'avons pas besoin de dogmes dans cette société d'entrepreneurs, mais plutôt de nouvelles pensées".
Evoquant par ailleurs "un lieu de création menacé par des restrictions budgétaires", Michel Lussault insiste sur la nécessité de défendre ce type d'institution, qui s'inscrit dans un "réseau plus large de productions de créations et d'intelligences".
La Ville de Lyon réévalue sa subvention à 400 000 euros pour la Villa Gillet
Preuve que cette institution, ancienne demeure de la famille d'industriels Gillet, devenue "maison européenne et internationale des écritures contemporaines", il y a 35 ans, est aussi incontournable dans la politique culturelle de la Ville de Lyon, la municipalité a décidé d'augmenter son financement pour 2023, en octroyant 400 000 euros (contre 256 000 euros auparavant).
"L'engagement de la Ville de Lyon pour le livre, dépasse le réseau lyonnais de libraires, les bibliothèques municipales ou les festivals dédiés. En cela, la Villa Gillet peut compter aussi sur notre soutien fidèle", a expliqué le maire de Lyon, Grégory Doucet.
Autre grand pourvoyeur du fonctionnement de la Villa Gillet, le ministère de la Culture qui, via sa direction régionale des actions culturelles (Drac) Auvergne-Rhône-Alpes, a remonté aussi ses financements. "Ce qui importe, c'est la clarté du projet mené, pas le montant des subventions même si nous les avons réévaluées", explique son directeur Marc Drouet, sans toutefois préciser le montant consenti.
A contrario, Nathalie Perrin-Gilbert, adjointe à la culture à la Ville de Lyon défend "une politique de financements basés sur le fonctionnement mais pas sur les projets", précisant que "les dotations supplémentaires à l'endroit de plusieurs lieux culturels lyonnais ont été faites pour ne pas briser la dynamique de création".
A lire entre les lignes, et la Villa Gillet est l'endroit idéal pour se livrer à ce type exercice, c'est bien la notion d'exception culturelle française, faisant référence à un secteur largement subventionné par rapport à d'autres pays européens qui fait toujours autant débat, entre deux écoles de pensées politiques : l'une basée sur le temps long et la création de valeur artistique, l'autre s'établissant sur un temps plus court, animée par la création de valeur ajoutée et une certaine idée de rentabilité.