Un plan stratégique régional pour la filière
La Région a présenté un plan stratégique pour la filière. Les deux projets phares concernent l'ouverture d'un campus aéronautique et le soutien au programme Aeroprint pour industrialiser la fabrication additive.
Le trafic aérien mondial doit doubler dans les prochaines années. De bon augure pour la filière aéronautique qui affiche des carnets de commandes déjà bien remplis. « Pour l'aviation civile, 37 400 appareils devront être livrés dans les 20 prochaines années. Aujourd'hui, Airbus possède un carnet de commandes pour 7 400 avions, soit 10 ans de production », fait savoir Didier Katzenmayer, directeur aux affaires industrielles d'Airbus Operations SAS.
Pour saisir les opportunités sur un marché très concurrentiel, les entreprises françaises sont passées d'un modèle artisanal à un modèle industriel basé sur la performance et la compétitivité. « Les acteurs se sont organisés, ont appris à travailler ensemble et surtout à chasser en meute. Nous avons aujourd'hui de grands champions de rang 1, les rangs 2 et 3 doivent désormais se structurer. La chaîne des fournisseurs doit se muscler et s'armer pour faire face à la concurrence internationale », analyse Didier Katzenmayer. « Ne croyons pas que nous sommes seuls », confirme Eric Trappier, Pdg de Dassault Aviation et président du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas).
En France, les régions Occitanie et Ile-de-France arrivent en tête sur le marché aéronautique, mais Auvergne-Rhône-Alpes a clairement une carte à jouer. « L'aéronautique fait partie des filières d'excellence du territoire et nous comptons des pépites dans toute la région. Nous devons prendre conscience de ce potentiel et accompagner son développement », affirme Laurent Wauquiez. Le président d'Auvergne-Rhône-Alpes a donc organisé le 5 novembre les premières assises régionales de la filière aéronautique et spatiale avec pour objectif de permettre aux acteurs de mieux se connaître et de créer un vrai écosystème. Dans la région, quelque 350 entreprises représentant 30 000 emplois directs et 3,3 Md€ de chiffre d'affaires développent des activités dans l'aéronautique autour de produits et services va variés. « Nous pouvons nous imposer dans le top 5 des régions européennes », estime Laurent Wauquiez qui a annoncé un plan stratégique de 137 M€ pour soutenir la filière (lire encadré). Les deux projets majeurs de ce plan stratégique portent sur la formation et sur l'innovation.
Pour permettre aux entreprises de recruter les compétences dont elles ont besoin, un campus aéronautique ouvrira en juin 2019 sur la base aérienne d'Ambérieu-en-Bugey dans l'Ain. Le site devrait accueillir 300 personnes avant de grimper progressivement à 500 personnes qui pourront suivre différentes formations aux métiers de l'aéronautique. « Nous investissons 5 M€ pour la création de ce campus. Le budget annuel de fonctionnement est évalué à 2,5 M€ », fait savoir Stéphanie Pernod-Beaudon, vice-présidente du Conseil régional en charge de la formation et de l'apprentissage, qui compare ce projet au modèle du campus numérique. Dans le secteur de l'innovation, la Région a signé un protocole d'accord avec Dassault Aviation pour l'industrialisation de la fabrication additive appliquée à l'aéronautique.
Ce programme, baptisé Aeroprint, sera soutenu à hauteur de 10 M€, sur un montant total de plus de 25 M€, pour permettre de tester et développer les projets d'impression 3D. Une plateforme industrielle collaborative va voir le jour sur le site de Dassault Aviation à Argonay en Haute-Savoie et mettra en relation les industriels, les laboratoires et les centres techniques. « L'enjeu concerne la certification des poudres car si nous sommes capables de réaliser des pièces avec l'impression 3D, nous devons obtenir les certifications de ces poudres pour que les pièces puissent équiper nos avions », explique Eric Trappier, Pdg de Dassault Aviation. Des premières industrialisations, après une phase de tests et pré-industrialisation en 2020, sont prévues à partir de 2022.
HEXCEL INVESTIT MASSIVEMENT EN AUVERGNE-RHÔNE-ALPES
L'un des leaders mondiaux de la fabrication de fibres de carbone, nids d'abeilles et autres matériaux composites vient d'inaugurer sa nouvelle usine de fibres de carbone sur la plateforme chimique de Salaise-sur-Sanne et construit un centre de R&D aux Avenières.
Créé en 1948, le géant américain, qui emploie 6 200 personnes dans le monde et réalise 2 Md€ de chiffre d'affaires, est très présent dans la région. « Hexcel possède trois usines en Auvergne-Rhône-Alpes, à Dagneux dans l'Ain, à Roussillon et aux Avenières en Isère. Nous comptons 1 200 collaborateurs en France, dont plus de 1 000 dans la région », indique Vincent Beynier, directeur général d'Hexcel Corporation. Le groupe réalise un chiffre d'affaires de 509 M€ dans l'Hexagone.
Le site de Salaise-sur-Sanne, qui s'étend sur 15 hectares, fabrique des fibres de carbone et de polyacrylonitrile (PAN) (© Hexcel)
A Dagneux, l'usine fabrique une large gamme de pré-imprégnés de résines BMI, phénolique et époxy qui entrent dans la composition des structures primaires et secondaires des avions commerciaux, ainsi que des avions et hélicoptères militaires. Le site des Avenières, qui existe depuis 1939, est aujourd'hui la plus grande usine de tissage de carbone en Europe. Et à Salaise-sur-Sanne, Hexcel a investi 200 M€ dans sa nouvelle usine de fabrication de fibres de carbone et de polyacrylonitrile. Ce site de 15 hectares a été inauguré début octobre. Le groupe américain ne s'arrête pas là puisqu'un nouveau projet se concrétisera prochainement. « Début 2019, nous ouvrirons un centre de R&D de 3 500 m2 sur le site des Avenières », rappelle Vincent Beynier. Ce centre devrait rassembler une cinquantaine de chercheurs et sera dédié aux nouveaux procédés et technologies de mise en oeuvre hors autoclave.
Pour rester à la pointe de l'innovation, Hexcel opère également des croissances externes et signe des partenariats stratégiques. Ainsi, il y a un an, le groupe a renforcé ses savoir-faire dans la fabrication de produits pré-imprégnés, d'adhésifs structuraux et de matériaux composites haute performance grâce au rachat de la société Structil basée dans l'Essonne. « En mars dernier, nous avons signé un accord avec Arkema », ajoute Vincent Beynier. Ce partenariat vise à développer les composites thermoplastiques du futur dans les applications aéronautiques en associant l'expertise d'Hexcel dans les fibres carbone et celle d'Arkema dans les poudres PEKK.
Tecalemit Aerospace a atteint la taille critique
Le groupe familial implanté à Chaponost développe et produit des canalisations souples, semi-rigides et rigides pour tout type de circuits. Cet été, le rachat de la division tuyauterie de Daher lui a permis de doubler de taille.
A l'origine tournée vers l'automobile, Tecalemit, créée en 1922, focalise ses activités dans l'aéronautique depuis le début des années 2000 et son acquisition par la famille Colcombet. L'entreprise, dont le siège social est situé à Chaponost, conçoit aujourd'hui tous les types de circuits et tubes pour le transport de fluides qui alimentent les moteurs et autres pièces clés des aéronefs.
En juillet dernier, Tecalemit a franchi un cap avec la reprise du site de Daher à Luceau. « Nous sommes passés de 30 à 60 M€ de chiffre d'affaires et de 200 à 400 collaborateurs », souligne Franck Colcombet. Le directeur général se réjouit d'avoir atteint une taille critique et d'être au seuil de l'ETI. Un changement de dimension loin d'être anodin. « Nous sommes en mesure de nous projeter à l'export et de démarcher les grands comptes », affirme Franck Colcombet. Le groupe s'organise autour de six sites : Chaponost, Blois, Luceau, Toulouse, Casablanca et Tunis.
SUNAERO VEUT ÉLARGIR SON PORTEFEUILLE DE SERVICES DE MAINTENANCE
Spécialisée dans les technologies de détection et de réparation de fuites de carburant, la PME de Genay, labellisée Pépite, prévoit de tripler son chiffre d'affaires d'ici 3-4 ans.
Dispositif de détection de fuite de carburant développé par Sunaero
Sunaero développe des technologies avancées pour détecter et traiter les fuites de carburant, mais a surtout su s'affirmer comme un prestataire de services de maintenance incontournable. Ce positionnement sur les services séduit les avionneurs qui veulent à tout prix réduire les temps et coûts d'immobilisation des aéronefs pour les opérations de production ou de maintenance.
« Nous avons deux axes de développement. D'un côté, nous voulons étoffer notre offre de services avec de nouvelles compétences, de l'autre, nous voulons innover en ajoutant des briques technologiques complémentaires à nos solutions », explique Jean Roussel. Le président de Sunaero n'exclut pas de réaliser des croissances externes pour atteindre ces objectifs. La PME, qui enregistre 6 M€ de chiffre d'affaires aujourd'hui, devrait enregistrer 18 M€ à horizon 2021.
Pour apporter réactivité, fiabilité et coût maîtrisé, Sunaero, qui emploie 48 personnes dont la moitié à Genay, dispose de deux filiales, l'une à Johor en Malaisie, l'autre à Nashville aux Etats-Unis.